Le rôle de la DSI dans l’entreprise de demain

03 décembre 2019

L’acronyme VUCA est de plus en plus utilisé pour qualifier notre environnement : « Volability, Uncertainty, Complexity, Ambiguity ». Frédéric OUDÉA, directeur général du groupe Société Générale, le confirme : “Nous sommes dans un monde de rupture des usages, alimenté par les technologies digitales favorisant l’émergence de nouveaux modèles opérationnels. Les GAFA n’ont que 25 ans”.

UN MONDE EN MUTATION QUI S’OPPOSE À UN « LEGACY » CONTRAIGNANT ET SOURCE DE TENSIONS

Chacun peut constater que le monde numérique change beaucoup plus vite que le cœur des systèmes d’information des grandes entreprises industrielles ou financières. La qualité de service et la sécurité demeurent bien souvent la première préoccupation des DSI, avec l’optimisation des coûts via la mutualisation, l’automatisation et la standardisation.

Cette préoccupation est d’autant plus importante que le SI « legacy » et ses infrastructures restent au cœur de l’entreprise et ont accumulé, au fil des nouveaux projets, beaucoup de complexité. Aux 220 milliards de lignes de Cobol viennent s’ajouter 5 milliards de lignes supplémentaires chaque année. Une complexité qui rend la maintenance et l’exploitation lourdes et contraignantes, avec un coût de possession compris entre 60 et 80 % des coûts informatiques souvent jugé insupportable. De plus en plus de dirigeants parlent de dette technique ou d’infrastructures inflexibles.

Cependant, les projets de remplacement de ces fameux « legacy » étant trop coûteux et risqués, cette situation conduit à des tensions de plus en plus fortes entre la DSI et les directions métiers. Celles-ci sont plus promptes à adopter des approches en rupture : prototypes, acquisition de start-up, choix SaaS…, avec toutes les difficultés qui en résultent pour les intégrer au reste du système d’information de l’entreprise.

UNE FONCTION DE DSI QUI S’OUVRE ET REVIENT AU CŒUR DU DÉBAT NUMÉRIQUE

Face aux désillusions de leurs directions générales, les DSI ont commencé à ouvrir le système d’information avec des « Data Lakes » et des architectures ouvertes, avant d’engager des chantiers plus lourds de désimbrication du code, avec des API permettant aux utilisateurs de consommer directement les données de l’entreprise. Ce mouvement est accéléré par un contexte réglementaire de plus en plus contraint par les gouvernements et les régulateurs : GDPR, DSP2, NIS, conformité bancaire …

Par ailleurs, un grand nombre de DSI se sont emparées des nouvelles capacités des technologies numériques, comme le cloud, le DevOps, l’in-Memory, l’IA ou l’IOT pour automatiser plus rapidement les chaînes de valeur et conduire la transformation de leur entreprise auprès des COMEX. Pour plusieurs DSI, les essais sur le numérique sont désormais derrière elles.

L’AGILITÉNOUVELLE SOURCE DE VALEUR DE L’ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

Les DSI sont engagées dans l’agilité des pratiques IT afin de regagner des marges de manœuvre dans des budgets sous pression, tout en améliorant la productivité des équipes. L’adoption des méthodes agiles en France reste néanmoins minoritaire et peu de DSI peuvent se prévaloir d’organisations agiles à l’échelle malgré tout l’intérêt qu’elles apportent aux métiers pour répondre à l’accélération du temps ou du « time-to-market » de leurs produits et services. Cette exigence d’instantanéité des utilisateurs et des clients est devenue un facteur de compétitivité des métiers de la distribution, du marketing, mais également de la supply chain et des opérations de back-office du secteur financier.

Tout va plus vite dans un monde incertain. Les directions IT et métiers n’ont d’autres choix, si elles veulent développer leurs parts de marché, que de devenir plus agiles. Guillaume PEPY, président de la SNCF, souligne dans son bilan : « On essaie de marier une culture digitale et une culture industrielle mais le temps industriel n’est pas celui du digital. Les projets digitaux ont des durées de vie courtes et pas mal de projets digitaux ont été au tapis parce qu’ils n’avaient pas de temps pour croître« . Pour les DSI, cela se traduit par un double rôle de transformateur auprès des métiers et d’architecte du SI numérique de demain : ouvert, réutilisable, maîtrisé et sécurisé.

CASSER LES SILOS DANS L’ORGANISATION ET REDONNER DU SENS

Il convient d’abord de transformer pour accompagner l’entreprise vers sa mutation en organisation agile, centrée sur des collaborateurs « formés »« autonomes » et « augmentés ». Plus que jamais, la DSI doit redonner du sens au travail des équipes informatiques en les rapprochant des équipes métier, en cassant les dépendances hiérarchiques improductives et en engageant les deux parties sur une cause métier claire et déclinée dans une logique verticale, de bout en bout : depuis la vision jusqu’aux opérations.

Trop de DSI se sont lancées dans des logiques de plateformes technologiques ou digitales sous forme de solutions imposées. Et elles constatent a posteriori que les métiers ne sont pas suffisamment embarqués. Nous croyons chez TNP aux logiques de plateformes de services ouvertes, tirées par les enjeux métier plutôt que normalisées et tirées par la technologie. Nous devons arbitrer entre les réflexes de massification des technologies et les besoins de « time to market » ou d’expérience client rendus possibles par l‘offre constamment renouvelée du marché numérique (IaaS, PaaS, SaaS …)

CONCEVOIR DE NOUVEAUX FONDAMENTAUX DATA CENTRIC

En tant qu’architecte, le DSI dispose avec l’ouverture des « data » de l’entreprise d’un formidable levier d’excellence opérationnelle pour leurs utilisateurs. Pas d’intelligence artificielle sans une architecture des informations. Quelle différence d’efficacité entre une entreprise qui a su développer un langage commun par rapport à celle où la donnée est inutilisable parce que de mauvaise qualité. Créer de la valeur avec la donnée est exigeant et demande une gouvernance forte, sous les bons auspices d’un COMEX, pour amorcer la transformation. Dans beaucoup de banques, il a fallu des obligations réglementaires pour se mettre en mouvement. Dans l’industrie et les services, on compte de nombreux « Data Lakes » dont bien peu sont fiabilisés.

LE DSI DE DEMAIN, COACH DE LA TRANSFORMATION NUMÉRIQUE DE L’ENTREPRISE

Agile, transformant, architecte et visionnaire, la fiche de poste du DSI du numérique ne cesse de s’allonger. Il faut y ajouter une forte compétence RH pour répondre aux défis sociaux et de formation que le numérique entraine parmi les populations informatiques traditionnelles. Comme l’indique un acteur du cloud, il n’y aura bientôt plus besoin d’administrateurs systèmes, ni d’opérateurs de salles dans les DSI ou les SSII. De même, l’agile et le DevOps apportent une rupture des pratiques de développement et de déploiement dans lesquelles des équipes techniques ne se retrouveront plus. Le DSI devra donc anticiper la mutation de sa propre organisation vers les nouveaux métiers de la technologie numérique.

Chez TNP, nous constatons que cet état de fait est d’abord une opportunité pour le DSI afin de développer une nouvelle compétence : celle de « coach » de l’entreprise. Comme tout bon « coach », celui-ci doit montrer comment utiliser les technologies numériques et apporter des conseils opérationnels, des méthodes efficaces pour accompagner la transformation des modes de management et des compétences des utilisateurs. Avec la DRH, il doit repenser les filières métiers en y apportant la technicité requise et les « soft-skills » voulus par l’entreprise hybride, c’est-à-dire numérique par nécessité et traditionnelle par culture.

En tant que « coach », le DSI doit apporter de l’innovation, de la technologie, ainsi que les réponses et les solutions aux enjeux de demain.

Thierry Cartalas
THIERRY CARTALAS
PARTNER
Laurent Gauzi
LAURENT GAUZI
ASSOCIATE PARTNER
Portrait Guy LETURCQ
GUY LETURCQ
DIRECTEUR GÉNÉRAL ET COFONDATEUR

 

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