Les aéroports de demain

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Un article de Juan MARCELINO, directeur associé, TNP, et Julie ACHIN, directrice, TNP, paru dans le livre blanc « La révolution des mobilités ».

Une infrastructure sous contraintes

Les aéroports actuels sont souvent situés en dehors des grandes zones urbaines où la connexion à la mobilité est supportée en grande partie par le routier et le ferré. Les aéroports dépendent essentiellement des compagnies aériennes où celles-ci sont fortement parties prenantes du développement des services au sein de l’aéroport. Les aéroports sont soumis à de nombreuses contraintes réglementaires et environnementales. Leur profonde transformation est aujourd’hui inévitable face aux nouvelles attentes en matière de mobilité durable et de services aux passagers. IATA estime que le trafic mondial en nombre de passagers pourrait atteindre 7,2 milliards d’ici 2035 et 10 milliards en 2050. D’ici 2040, l’investissement dans le marché mondial aéroportuaire devrait augmenter de 14,4 % (200 milliards de dollars, pour atteindre 2 404 milliards de dollars d’ici en 2040). Ces investissements doivent permettre de répondre à cette croissance du trafic aérien mais également aux enjeux de transformation majeure de l’aéroport de demain.

La ville de demain

L’aéroport de demain ne doit plus être perçu comme un simple lieu de transit de passagers prenant l’avion, mais comme un véritable centre de vie et d’échanges. Il constitue la vitrine d’un pays ou d’une région, et la première impression laissée aux visiteurs, ce qui implique d’y intégrer des services conçus pour en faire un espace de bien-être et d’expériences. L’objectif est de favoriser ainsi une atmosphère plus agréable et réduisant le stress des voyageurs.

L’aéroport de demain sera assimilé à une ville dont le moteur sera essentiellement un point de connexion des flux de passagers et de marchandises. Cette évolution vers un concept d’aéroport dit « intelligent » repose sur plusieurs axes. D’abord la digitalisation des infrastructures, c’est-à-dire, la gestion intelligente des flux de passagers, l’optimisation des parcours grâce à l’IA et l’automatisation des contrôles de sécurité. Ensuite, l’intégration de nouvelles mobilités avec le développement d’infrastructures pour accueillir les nouvelles technologies de transport (e-VTOL, hyperloop, véhicules autonomes, dirigeables,drones, etc.). L’aéroport intégrera surtout l’intermodalité qui comprend la connexion f luide avec les réseaux ferroviaires, maritimes et routiers.

En fait, l’aéroport du futur sera un agrégateur des nouvelles mobilités. Il intégrera des infrastructures adaptées aux nouvelles mobilités, à la fois pour les courtes distances (vélos, trottinettes, véhicules volants autonomes), les moyennes distances (trains à grande vitesse ou avions électriques) et les longues distances (avions à hydrogène et autres technologies vertes).

Les enjeux environnementaux et la transition énergétique

Depuis la crise du COVID-19, les préoccupations environnementales se sont intensifiées. Le secteur aérien doit améliorer son image en réduisant son empreinte carbone et en devenant plus vertueux que le ferroviaire. L’objectif est donc de créer des aéroports autonomes énergétiquement, exploitant des solutions comme l’hydrogène, le solaire et l’éolien, voir la géothermie. Ces nouvelles infrastructures pourraient devenir des producteurs d’énergie, non seulement pour leur propre fonctionnement, mais aussi pour fournir de l’énergie à la région. Certains projets pilotes, comme l’aéroport d’Oslo, montrent la voie en expérimentant des avions électriques en réduisant l’empreinte carbone de leurs infrastructures. L’enjeu est d’aller encore plus loin, avec des terminaux construits en matériaux écologiques, une meilleure gestion des déchets et une empreinte énergétique neutre.

Le poumon du développement d’une région

L’aéroport doit être partie prenante dans le développement économique d’une région. C’est pourquoi, les nouveaux services intégrés permettront aux personnes isolées de bénéficier directement de services à l’aéroport. L’aéroport, générateur d’emplois aura la tâche de promouvoir l’activité touristique et culturelle d’une région, ainsi que les produits locaux.

Les aéroports vont évoluer vers des espaces multifonctionnels intégrant de nouveaux services tels que des centres commerciaux et des espaces de loisirs pour aboutir à une véritable transformation de l’aéroport en lieu de consommation et de détente à l’image des aéroports de Singapour ou de Dubaï. Nous pouvons imaginer la production et la vente de produits locaux en partenariat avec les agriculteurs de proximité, des espaces de loisirs tels que des salles de cinéma, des hôtels et des espaces de co-working. L’avenir ne concernera pas que les voyageurs en transit, mais l’ensemble de la population autour de l’aéroport qui a besoin de services. Les aéroports deviendront de véritables centres d’affaires en « transit », offrant des bureaux temporaires et des services de conciergerie adaptés aux voyageurs d’affaires.

Les contraintes économiques et géopolitiques

Les aéroports de demain devront également relever des défis majeurs, notamment en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Cet enjeu nécessitera des avancées significatives en cybersécurité et en surveillance afin de garantir la sûreté des infrastructures et des passagers, tout en intégrant les nouvelles technologies de reconnaissance et d’anticipation des menaces. Parallèlement, les révolutions technologiques et énergétiques imposeront une accélération des innovations dans le domaine de l’aviation durable, de la gestion intelligente des flux et de l’optimisation énergétique, ce qui exigera des investissements considérables pour moderniser les équipements. Enfin, la volonté politique et la coopération internationale joueront un rôle crucial dans l’harmonisation des standards de régulation, la mise en place de politiques communes et le partage des meilleures pratiques.

Le nouveau pivot de la mobilité mondiale ?

À terme, ils deviendront, avec les ports, les moteurs du transport mondial, où seuls les trains et les véhicules aériens auront leur place (dirigeables, e-VTOL, drones passagers…), éliminant progressivement les autres modes de transport terrestre. Cette concentration de mobilités aériennes redéfinira l’aéroport en « Aérotropolis », un concept le plaçant au cœur du développement urbain et économique. Connecté aux infrastructures de transport (ports, gares), il optimisera les f lux passagers, énergétiques et logistiques. L’évolution des infrastructures aéroportuaires ne concerne pas seulement l’aviation, mais l’ensemble des mobilités du futur. L’enjeu est de repenser totalement la façon dont nous nous déplaçons, en intégrant l’aéroport dans une logique de ville connectée et durable. Les aéroports seront des laboratoires de l’innovation, expérimentant les solutions de transport qui dessineront les contours des métropoles du futur, reliées aux ports maritimes, qui permettront de gérer les flux passagers, énergétiques et de marchandises.

Comme nous l’avons vu, des partenariats se mettent en place aussi bien sur les sujets de transports passagers (Air France, SNCF, …) que logistiques. Faut-il envisager la création de grands groupes internationaux de la mobilité, intégrant tous les types de transports, à l’image des GAFAM comme Microsoft, Amazon ou Google ? C’est toute la question.

Juan MarcelinoDirecteur associé
Julie AchinDirectrice