Mythe et réalité de l’hydrogène vert

Un article de Ludovic Piacka, associé TNP et Zineb Elourzadi, consultante senior TNP paru dans le livre blanc « Comment accélérer la transition énergétique ? »

L’hydrogène vert ou renouvelable suscite l’espoir de nombreux observateurs. Source d’énergie propre, elle pourrait à terme remplacer les combustibles fossiles dans de multiples secteurs et contribuer ainsi à décarboner l’économie française. Pourtant, les défis à surmonter restent considérables. Alors, l’hydrogène vert est-il vraiment la solution pour l’avenir de l’énergie ? Enquête.

 

Hydrogène vert

Rappelons tout d’abord que l’hydrogène à l’état pur est presque inexistant sur la Terre. Des sources naturelles d’hydro- gène ont bien été découvertes. Elles restent le plus souvent difficilement accessibles et encore moins exploitables.

La molécule d’hydrogène est toutefois présente dans l’eau, le gaz ou encore le pétrole, de façon combinée. Pour l’isoler, une réaction chimique à partir d’une ressource primaire est par conséquent indispensable.

Dans 95 % des cas, l’hydrogène est produit grâce à des procédés thermochimiques à partir d’une énergie fossile. On parle alors d’hydrogène gris. L’hydrogène vert est, quant à lui, obtenu par l’électrolyse de l’eau, au moyen d’une électricité produite à l’aide d’une ressource primaire décarbonée et renouvelable (barrages hydrauliques, éoliennes ou panneaux solaires).

Bon à savoir : la France produit principalement de l’hydro- gène jaune, aussi appelé hydrogène bas carbone. Celui-ci est fabriqué par électrolyse de l’eau à partir de l’énergie nucléaire.

 

Le pari de l’hydrogène vert

  • Un pari écologique

L’hydrogène présente un intérêt écologique majeur évident. À l’heure actuelle, la France consomme environ 900 000 tonnes par an d’hydrogène gris, responsables de près de 9 millions de tonnes de CO2.

Un recours massif à l’hydrogène vert, notamment dans des secteurs déjà consommateurs de cette source d’énergie, permettrait donc de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Son procédé chimique présente en effet l’avantage de rejeter uniquement de l’eau dans l’atmosphère. Son extension à des industries actuellement peu utilisatrices d’hydrogène, comme la métallurgie ou la sidérurgie, pourrait aussi contribuer à la décarbonation du secteur industriel.

D’autres applications sont par ailleurs envisagées. Les trans- ports lourds, à l’instar des avions, des trains ou encore des camions, se prêtent difficilement à l’utilisation des moteurs électriques à batterie. L’hydrogène vert apparaît donc comme une solution pertinente.

Enfin, dernier intérêt majeur : contrairement à l’hydrogène jaune produit à partir de l’énergie nucléaire, la question des déchets est inexistante.

  • Un pari technique

Stocker les sources d’énergies renouvelables au même titre que le pétrole ou le gaz se révèle être un véritable défi technologique. En l’état actuel de la technique, c’est tout simplement impossible. Le vent ou encore les rayons du soleil ne peuvent pas être conservés pour une utilisation ultérieure.

En revanche, l’hydrogène peut être stocké en période de surplus de production, dans des réservoirs ou des cavités géologiques.

Bon à savoir : l’émergence d’une filière française de l’électrolyse offre de nouvelles perspectives en termes d’emploi et de développement des territoires.

 

Les limites de l’hydrogène vert

Premier écueil, la production d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau se révèle particulièrement coûteuse par rapport à l’hydrogène gris. Ce manque de compétitivité pourrait, toutefois, être contourné par une mise en production à grande échelle. Cela suppose néanmoins des investissements massifs de la part des pouvoirs publics.

Autre limite majeure : la faiblesse des rendements de production. En l’état actuel des techniques employées, lors du processus de production par électrolyse de l’eau, la perte d’énergie est estimée à 30 % environ. Une proportion équivalente sera ensuite perdue au moment de l’utilisation de l’hydrogène vert dans une pile à combustible, par exemple.

Enfin, signalons que l’hydrogène est un gaz inflammable et explosif au contact de l’oxygène. Il présente par ailleurs des caractéristiques chimiques le rendant plus difficile à contenir. Le risque d’accident et de fuite ne doit pas être négligé. Des mesures de sécurité spécifiques s’imposent.

S’il apparaît comme une solution pertinente, l’hydrogène vert ne contribuera pas à lui tout seul à la décarbonation de notre économie. Pour assurer une transition énergétique optimale, l’utilisation mixte de sources alternatives, associée à une réduction massive de notre consommation d’énergie, s’avère le seul chemin à suivre.

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