Loi « ECKERT » : Comment réveiller le secteur financier sur les comptes dormants ?

02 juillet 2016

La loi ECKERT, de son initiateur Christian ECKERT (Secrétaire d’État au budget depuis le 09 avril 2014), relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence, est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2016. L’objectif de la loi Eckert est de protéger davantage les intérêts des clients. Mais est-ce le seul ?

CONTEXTE ET OBJECTIFS

1,2 milliard d’euros pour les comptes bancaires et 2,76 milliards pour les contrats d’assurance-vie. Ces chiffres (estimation « basse » de la Cour des comptes dans le rapport du 17 juillet 2013), représentent les sommes des comptes bancaires inactifs et contrats d’assurance-vie en déshérence. Avant la mise en vigueur de la loi, les banques avaient peu d’obligations de rechercher les propriétaires de ces avoirs « oubliés ». Après 10 ans, les sommes pouvaient être transférées à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC). Dans les faits, elles n’étaient versées à l’État qu’au terme de la prescription trentenaire, déduites des frais de gestion (70 € en moyenne/an). La loi Eckert vise donc à protéger les épargnants et leurs ayants droit en renforçant le dispositif d’encadrement et de contrôle des comptes inactifs. À cet effet, la loi a levé toute ambiguïté en inscrivant au « Code monétaire et financier » la notion de « compte inactif » : période de 12 mois sans aucune opération ou manifestation à l’initiative de son titulaire, représentant légal ou personne habilitée (à l’exception des inscriptions d’intérêts et débits par l’établissement). Le périmètre de la loi inclut les comptes bancaires, les contrats d’assurance-vie, ainsi que les coffres forts.

QUELS IMPACTS POUR LES ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS ?

Qui mieux qu’une banque peut évoquer les problématiques de mise en œuvre ? Des intervenants dans les établissements financiers sur le chantier Loi Eckert nous apportent des éclaircissements. Une des principales difficultés dans la mise en place de la loi Eckert réside dans l’identification des clients ayant des comptes inactifs au sens « Eckert » dans les Systèmes d’Information, nous explique un intervenant Métier. En effet, avant cette notion réglementaire de « comptes inactifs », les banques considéraient un client comme inactif lorsqu’il était NPAI (N’habite Pas à l’Adresse Indiquée) ou CID (Compte client Inconnu ou Disparu). À présent, il est nécessaire d’effectuer des recherches plus approfondies, et cela implique des développements dans nos outils. À cela s’ajoute l’obligation de consultation du fichier RNIPP (consultation qui plus est payante). Autre difficulté : la capacité de stockage et d’archivage des documents d’information client. Les banques ont en effet l’obligation de conserver ces documents sur une durée de 30 ans. Néanmoins, il était utile d’avoir un cadre réglementaire qui clarifie la gestion de ce type de clientèle. Au-delà du respect de la réglementation, la recherche des héritiers représente de nouvelles opportunités de placements du capital reçu. À ce jour, le nombre de comptes inactifs représenterait entre 5 % et 8 % de la clientèle des établissements majeurs de la place, nous explique notre interlocuteur. Pour les établissements financiers, outre un problème majeur de fiabilisation des données et d’évolutions nécessaires d’outils, la loi Eckert représente à la fois une perte de PNB (baisse des frais de gestion plafonnés à 30 € contre 70 € en moyenne avant l’application la loi), mais également un coût financier pour ces derniers (envoi des courriers d’informations clients, évolution des outils, consultation du fichier RNIPP, etc.) Au final, au-delà de l’objectif rempli de protection des intérêts des clients, la loi Eckert semble être également un dispositif de transfert de fonds, des établissements financiers vers l’État.

 

jessica delattre

JESSICA DELATTRE
MANAGER

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